Musique Baroque en Avignon : Bonjour, Justin Taylor, et merci de nous accorder cette interview. Le 25 mai dernier, vous étiez à la Philharmonie de Paris aux côtés du claveciniste William Christie, du violiste Jordi Savall et du violoncelliste Christophe Coin pour un programme réunissant plusieurs compositeurs baroques. Comment vous êtes-vous senti sur ce projet ?
Justin Taylor : Ce fut assez vertigineux de pouvoir être sur ce projet avec ces légendes et jamais je n’aurais pensé me retrouver à la Philharmonie de Paris à leurs côtés ! Nous avons travaillé plusieurs jours en amont et, qui plus est, sur des instruments originaux, tous conservés au Musée de la Musique à Paris. Pour ma part, j’ai dû apprendre à me familiariser avec le clavecin, chacun détient une personnalité et sonorité singulière (ne serait-ce qu’au niveau de son étendue musicale !).
M.B.A. : Le 28 juin prochain à l’Opéra Grand Avignon, vous serez à l’affiche avec le claveciniste William Christie dans un programme mêlant Rameau, Couperin et Le Roux. Pourquoi les avoir réunis ?
J.T : Voulant défendre le répertoire baroque français, nous avons choisi des compositeurs français, et particulièrement Le Roux qui demeure fascinant, car on ne sait presque rien, hormis ces quelques pages de musique que nous jouerons le 28 juin. Certains musicologues émettent l’hypothèse d’un pseudonyme pour un autre compositeur qui aurait souhaité rester dans l’anonymat. Quant à l’écriture, c’est une des plus raffinées et qui se rapproche de Couperin. Enfin, le morceau théâtral et opératique des Sauvages de Rameau est un clin d’œil au grand parcours de William Christie et des Arts Florissants.
M.B.A. : Nous savons que, suivant le fabricant ainsi que le pays de fabrication, un clavecin peut sonner tres différemment. Choisissez-vous des clavecins à la sonorité particulière ?
J.T. : Nous choisissons toujours des clavecins qui correspondent au mieux avec le programme choisi. Pour celui-ci, nous aurons deux clavecins français. En toute modestie, William Christie et moi-même cultivons cet amour du ‘’chant’’ au clavecin, nous essayons donc de nuancer et d’assouplir le son afin de le rendre sensuel et lyrique, car il est vrai que l’instrument donne un son un peu nerveux, alors qu’il peut être un instrument sensible et rempli d’émotions.
M.B.A. : Nous avions eu l’honneur de vous accueillir en avril 2018 pour un programme « Chromatismes », consacré à Bach et à Rameau. Quel souvenir gardez-vous de ce concert ?
J.T. : J’en garde un formidable souvenir, d’autant plus qu’il s’agissait de mon premier concert en Avignon ! De plus, j’accorde une grande importance à l’acoustique du lieu du concert, car le son peut être bien différent selon l’instrument, et la Chapelle de l’Oratoire était parfaite pour accueillir un récital de clavecin.
M.B.A. : Quels sont vos projets artistiques ?
J.T. : Je prépare mon prochain enregistrement consacré aux influences italiennes dans la musique de Jean Sébastien Bach qui devrait sortir en septembre prochain. On imagine Bach comme un grand intellectuel dont la perfection dépasse l’humain, et j’ai souhaité explorer une autre facette un peu plus humaine où il cède au lyrisme et à l’effervescence italienne. Il y aura donc une partie consacrée à des œuvres de Vivaldi retranscrit par Bach pour clavecin seul ainsi que d’autres œuvres un peu plus tardives comme le Concerto italien.
Propos recueillis par Marjorie Cabrol