M.B.A. : Bonjour, Alexis Labat, et merci de nous accorder cette interview. Quel a été votre premier souvenir musical ? Qu’est-ce qui vous a amené à la musique ?
Alexis Labat : Ce n’est pas mon premier souvenir, mais assurément le plus marquant. C’était lors d’une représentation du “Sacre du Printemps” à la Salle Pleyel avec le London Symphony Orchestra dirigé par Valery Gergiev. La configuration était particulière et marquante pour moi, car nous avions la possibilité d’être derrière la scène et j’ai donc vu Valery Gergiev diriger en face de moi avec cette volonté de rendre son orchestre le plus vibrant et violent par sa vision de l’œuvre. C’était donc un moment assez troublant.
J’ai commencé les cours de piano à l’âge de cinq ou six ans et me destinant à une carrière de médecin, j’ai donc entamé des études de médecine, que j’ai vite abandonnées car la passion de la musique a vite repris le dessus. J’ai entrepris des études de musicologie puis d’administration en gestion de la musique et me suis retrouvé assez rapidement en tant qu’administrateur de l’Orchestre national d’île- de-France.
M.B.A. : Vous êtes directeur de l’Orchestre national Avignon-Provence depuis décembre 2021. Quels principaux axes souhaitiez-vous mettre en valeur au début de votre mandat ? Sont-ils toujours les mêmes ou ont-ils évolué ?
A.L. : Ils sont toujours en cours d’élaboration Le premier est de diffuser le plus largement possible sur l’ensemble de la région. C’est un axe très important pour être au plus près des publics du territoire (ruraux ou isolés de l’agglomération). Il faut donc constamment se réinventer dans les formats et répertoires que l’on va proposer pour donner envie au public de nous découvrir. Transmettre est également dans les gènes de l’orchestre : nous avons le projet « Démos » ainsi qu’un nouveau projet en cours afin d’aller à la rencontre de la jeunesse. Enfin, un dernier axe repose sur le croisement des esthétiques qui est intéressant à la fois pour les échanges avec les artistes mais aussi avec un plus large public : l’année dernière, nous avions eu ainsi un projet avec Angélique Kidjo et nous en avons un cette année avec Mika aux Chorégies d’Orange. C’est donc aborder de nouveaux répertoires et un nouveau public, tout en continuant de développer la qualité de l’Orchestre.
M.B.A. : Ce 31 mai à la Scala Provence, nous retrouverons l’Orchestre national Avignon-Provence aux côtés du claveciniste Kenneth Weiss. Il s’agira de la première collaboration entre l’Orchestre national Avignon-Provence et Musique Baroque en Avignon. Comment est née cette collaboration ?
A.L. : Cela fait un moment que nous voulions programmer cette intégrale des Concertos Brandebourgeois et nous avons accepté la proposition de Musique Baroque en Avignon avec grand plaisir. Je suis très heureux qu’on puisse ainsi commencer une collaboration autour de cette œuvre emblématique de Bach.
M.B.A. : Donner l’intégrale des Concertos Brandebourgeois de Bach représente un sacré défi. Selon vous, quels sont les aspects les plus stimulants de travailler avec le claveciniste Kenneth Weiss sur un projet aussi ambitieux ?
A.L. : C’est un grand défi dans la mesure où ce n’est pas un répertoire qu’ils ont l’habitude d’aborder, d’autant plus avec un spécialiste du répertoire comme Kenneth Weiss. C’est donc aller à la rencontre d’un autre genre musical. Le contact avec Kenneth Weiss va apporter quelque chose de bénéfique en donnant de nouveaux aspects d’interprétation. C’est une soirée marathon pour celles et ceux qui participeront à ce concert, public comme musiciens.
M.B.A. : Quels sont les projets artistiques de l’Orchestre ?
Le mois de juin va être intense. Deux jours après, nous aurons un concert à la Chapelle du Méjan à Arles avec le pianiste Jean-François Heisser et la cheffe d’orchestre Débora Waldman sur un programme consacré à Beethoven et Mozart. Nous enchaînerons avec Boris Godounov sous la direction musicale de Dmitri Sinkovsky à l’Opéra d’Avignon du 14 au 16 juin. Nous accompagnerons Mika sous la direction de Simon Leclerc aux Chorégies d’Orange le 23 juin et serons également à Aix-en-Provence le 28 juin pour un concert « Parade(s) » dirigé par Giacomo Sagripanti. Nous venons de créer un projet qui se nomme L’Histoire de Monsieur Bois s’adressant de nouveau aux jeunes et que nous commençons tout juste à diffuser dans les écoles maternelles : un projet qui a été fait par eux et pour eux.