Musique Baroque en Avignon : Bonjour, Camille Allérat, et merci de nous accorder cette interview. Comment avez-vous découvert la musique classique ainsi que votre voix ?
Camille Allérat : Il y a toujours eu de la musique à la maison : mon père est pianiste jazz, et il a rencontré ma mère dans un chœur d’adultes : c’est donc tout naturellement que j’ai, dès l’âge de 4 ans, eu envie de chanter et de jouer du violon. La pratique collective du chant ne m’a plus jamais quittée, mais ce n’est devenu un objectif professionnel que bien plus tard. J’ai eu en effet besoin de temps pour réaliser que j’avais les capacités de vivre réellement de ce métier et pour prendre confiance en moi ! Ma voix a beaucoup évolué au fil des années grâce à mes différents professeurs de chant et à mes expériences variées : elle me permet aujourd’hui d’explorer des répertoires très différents les uns des autres.
Musique Baroque en Avignon : Vous avez chanté dès le plus jeune âge à la Maîtrise ainsi qu’au sein du chœur d’enfants La Cigale de Lyon. Que vous ont apporté ces expériences ?
C.A : La participation à ces deux chœurs d’enfants prestigieux a été une expérience fondatrice de ma pratique du chant actuelle. Outre le bonheur et la fierté d’être sur scène à l’époque, j’en ai gardé une forte endurance vocale, une bonne résistance à la fatigue, mais surtout un amour du travail collectif : pour moi, le groupe est primordial pour que je me sente bien dans un projet et cela nourrit réellement mon interprétation, y compris lorsque je chante en soliste. Garder en tête que la musique est absolument toujours une aventure de création collective est à la base de ma vision de ce métier à part.
Musique Baroque en Avignon : Artiste complète, vous touchez à tout type de répertoire, tout en laissant une grande place au répertoire baroque et travaillez avec des ensembles prestigieux comme Pygmalion ou le Chœur de chambre Spirito. Que représente ce style de répertoire pour vous ?
C.A : Le répertoire choral fait partie de mon ADN : créer du son, de la musique, par la combinaison de plusieurs voix représente une magie sans égal. Spirito et sa cheffe Nicole Corti ont été mon premier employeur à Lyon : pour moi, c’est une maison chaleureuse dans laquelle j’ai grandi et évolué petit à petit. Je m’estime extrêmement chanceuse de travailler depuis plusieurs années avec Pygmalion et Raphaël Pichon, entre la plus grande exigence musicale et un groupe de personnes extraordinaires, une vraie famille. Le répertoire baroque est en effet mon favori, par sa richesse, ses couleurs et sa liberté dans l’expression des sentiments, même si j’aime en réalité chanter une multitude de styles, y compris de la musique contemporaine au premier abord très aride : au fur-et – à mesure du travail, ces partitions parfois extrêmement compliquées révèlent toujours un langage et une beauté.
M.B.A. : En 2019, vous cofondez l’ensemble La Néréide avec les soprani Julie Roset et Ana Veira Leite. Quels étaient ses objectifs lors de sa création ? En avez-vous de nouveaux aujourd’hui ?
C.A : Je ne sais pas si nous avions d’autres objectifs au début de notre travail que celui de se faire plaisir en chantant ensemble. Nos voix se mariaient très bien et ce fut une sorte de coup de foudre de son, comme une évidence : il fallait que nous créions quelque chose toutes les trois !
Depuis 2019, nos vies et carrières respectives ont pris de grands tournants et aujourd’hui nous sommes plus que jamais impatientes de partager notre progression au maximum. Nous avons commencé par enregistrer cet incroyable répertoire des Dames de Ferrare mais nous avons bien sûr de nouveaux programmes en préparation, des envies de voyages et des idées bien arrêtées sur l’identité de l’ensemble et son évolution future. De belles surprises arrivent, y compris pour nous certainement !
M.B.A. : Un rituel d’avant-scène ?
C.A : Si je ressens du stress, je fais généralement une séance de cohérence cardiaque. Mais la plupart du temps, je préfère papoter avec tout le monde et aller aux toilettes environ 17 fois. (rires)
M.B.A. : Quels sont vos projets artistiques ?
C.A : En juin prochain, je participerai à une superbe production d’Orphée et Eurydice de Gluck avec l’ensemble Pygmalion à Bordeaux. Cet été, plusieurs programmes en solo m’attendent dont un récital avec orchestre à cordes autour de l’écrivain Pierre Loti. En septembre, j’enregistrerai le Dixit Dominus de Haendel (ainsi que celui de Lotti) à une par voix avec l’ensemble Les Argonautes à Genève, juste après avoir enregistré le Requiem de Mozart avec Pygmalion.