Musique Baroque en Avignon: Bonjour Julie Roset, et merci de nous accorder cet entretien. Pour commencer, pouvez-vous nous raconter votre parcours musical : vos débuts, vos études, et les rencontres marquantes qui vous ont guidée vers le chant baroque ?
Julie Roset: Je suis originaire d’Avignon, où j’ai commencé mes études musicales au conservatoire. Avec des amis musiciens, nous avions créé un petit ensemble, “La Mascarade”, qui se produisait notamment pendant le Festival d’Avignon. C’est là que j’ai découvert mon goût pour le répertoire baroque. Pour approfondir, j’ai rejoint le conservatoire d’Aix-en-Provence, dans la classe de Monique Zanetti, où j’ai exploré la musique ancienne sous toutes ses formes : chant, musique de chambre, danse baroque. J’ai ensuite poursuivi mes études à Genève, où j’ai effectué un bachelor en musique ancienne. Désireuse d’élargir ma pratique, j’ai ensuite intégré la Juilliard School de New York, dans le programme Artist Diploma, auprès d’Edith Wiens. Après de multiples concours et auditions, me voilà enfin prête à partager ma musique avec le public !
MBA: Qu’est-ce qui vous a particulièrement attirée vers le répertoire baroque et comment l’abordez-vous en tant qu’interprète ?
J.R: Ce qui me fascine dans la musique baroque, ce sont avant tout les dissonances et la liberté d’expérimentation des compositeurs. À Genève, j’ai pu observer l’évolution de l’écriture, par exemple chez Monteverdi, qui a introduit des accords de plus en plus audacieux. J’aime aussi beaucoup le principe du figuralisme, cette façon de traduire le sens des mots par la musique : un oiseau qui tombe sera suggéré par une trille suivie d’une ligne mélodique descendante, par exemple. Ce répertoire va très loin dans l’expressivité et la musicalité, que ce soit par les harmonies ou l’utilisation de la voix. En tant qu’interprète, j’aime explorer cette dimension presque expérimentale, où chaque mot et chaque son deviennent porteurs de sens.
MBA: Donc aujourd’hui, vous vous consacrez uniquement au baroque, et pas au bel canto ?
J.R: Non, pas du tout ! Je fais vraiment les deux. C’est d’ailleurs pour cela que je suis allée à la Juilliard, afin de travailler à la fois le répertoire baroque et les répertoires classique et romantique. Simplement, dans ceux-ci, je choisis des rôles qui correspondent vraiment à ma voix et qui me permettent d’exprimer pleinement ma personnalité.
MBA: Vous chanterez le 13 septembre prochain à la Collection Lambert pour notre association, Musique Baroque en Avignon. Que représente pour vous ce lieu et ce partenariat ?
J.R: Je suis très heureuse de revenir chanter à Avignon, car c’est ici que tout a commencé pour moi. La Collection Lambert est un lieu que j’affectionne particulièrement, et où j’ai déjà eu l’occasion de me produire, notamment avec l’ensemble “La Mascarade” à mes tout débuts. Y revenir aujourd’hui, dans un autre contexte, a donc une dimension très symbolique, comme un retour aux sources. C’est donc très émouvant pour moi.
MBA: Pouvez-vous nous donner un aperçu du programme de ce concert et des émotions que vous espérez transmettre au public ?
J.R: Dans la partie sacrée, comme le Miserere, les trois voix féminines soutenues par l’orgue créent une atmosphère très solennelle. Les dissonances y renforcent l’intensité du texte, ce qui créé une véritable demande de pardon. À l’inverse, la partie profane, accompagnée du théorbe ou de la viole de gambe, est plus intime et met en musique les premiers émois amoureux, le printemps, la délicatesse des sentiments. Nous avons voulu raconter l’histoire d’une jeune fille partagée entre recueillement spirituel et découvertes personnelles, et offrir au public ce contraste d’émotions. Nous espérons maintenant que les personnes présentes se laisseront embarquer dans ce voyage musical.