Musique Baroque en Avignon : Bonjour, Victor Julien Laferrière, et merci de nous accorder cette interview. En mai 2023 est paru votre nouvel enregistrement en hommage à Henri Dutilleux. Vous avez décidé de le confronter au compositeur Dusapin en y insérant une de ses créations « Outscape ». Quelle relation avez-vous avec ces compositeurs ? Pourquoi les avoir associés ensemble sur ce même disque ?
Victor Julien-Laferrière : Le concert de Dutilleux est entré dans le répertoire des violoncellistes et les étudiants commencent à l’étudier assez jeunes. J’ai pu jouer cette musique à mes quinze ans au Conservatoire de Paris et dès que j’ai pu la programmer avec un orchestre, j’ai sauté sur l’occasion ! Comme il était prévu que je joue cette formidable création de Dusapin, nous avons décidé de les réunir pour l’occasion de cet enregistrement en live. J’associerais une sorte de parenté dans l’esthétique et la culture musicale, mais les deux projets sont différents (et le fait qu’ils le soient rend l’écoute plus intéressante !).
M.B : En parallèle de votre carrière de violoncelliste, vous vous adonnez depuis quelques années à une deuxième carrière qui est celle de chef d’orchestre. Votre été a été notamment marqué et remarqué par votre première direction de l’intégrale des symphonies de Beethoven avec votre propre ensemble, Consuelo, au Festival de la Chaise-Dieu, qui a abouti à un enregistrement en live. Dans une interview accordée à France Musique, vous dites ces mots : « J’ai commencé le violoncelle en imaginant être chef d’orchestre ». Pouvez-vous expliquer cela ?
V.J.L : L’idée de diriger était assez claire pour ma part, même si dans la famille il fallait attendre d’avoir la connaissance théorique et la pratique suffisante pour prétendre à la direction. Je me suis donc réservé cette idée en tête pour plus tard et à travers mes instruments (le violoncelle, mais aussi la clarinette et un peu de piano…), je me disais qu’un jour, je pourrais jouer dans des orchestres et donc aller à la rencontre des chefs-d ’orchestre.
M.B. : Quelles œuvres aimeriez-vous diriger prochainement ?
V.J.L : Tellement de choix qu’il serait difficile d’en isoler ! Je m’estime déjà chanceux d’avoir pu diriger l’ensemble des symphonies de Beethoven qui demeure un chef-d’œuvre fascinant, car elles représentent différentes périodes de sa vie de compositeur, réunie en une sorte de grande unité. Mais je ne peux pas décider, j’aime quand les choses sont variées et contrastantes. En tant que violoncelliste, j’ai toujours été éclectique dans mes choix de programmes et il en va de même pour la direction, et je crois que cela se reflète à travers les projets de l’Orchestre Consuelo (nous aimons passer de Mozart au Mahler, et devrions attaquer Schoenberg dans quelques mois… !).
M.B : Le 14 octobre prochain, vous présenterez aux côtés du claveciniste Justin Taylor un programme principalement axé sur Vivaldi et Geminiani. En tant qu’artiste qui touche tout type de répertoire, comment abordez-vous la musique baroque ?
V.J.L : Même si je suis attaché à la musique de Bach ainsi qu’au répertoire de continuo baroque, je n’ai pas encore beaucoup joué de Vivaldi et Geminiani, et je suis heureux et chanceux de pouvoir le faire aux côtés et « sous la houlette » de Justin. Nous avons pris l’habitude de travailler ensemble depuis 5-6 ans et cela se passe très bien car, même si nous venons de deux mondes musicaux assez différents, nous avions déjà une manière commune d’aborder la musique assez naturelle.
M.B. : Où pourrons-nous vous écouter prochainement ?
V.J.L : Le 27 octobre prochain, je jouerai le concerto pour violoncelle opus 125 de Prokofiev avec le Timisoara Orchestra, dirigé par Antonio Méndez au Banatul Timisoara Philharmonic Hall. Puis, du 23 au 25 novembre, je serai aux côtés de la violoniste Simone Lamsma et du chef Domingo Hindoyan pour un programme autour de Brahms à Liverpool, Cardiff et Nottingham.. Et enfin, de retour en France au Théâtre des Champs-Elysées les 15 et 16 décembre prochains pour “Le Grand Concert de Noel Radio Classique”.
Propos recueillis par Marjorie Cabrol